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Monsieur Prudhomme

Un organiste en l’Abbaye de Bégar (1651)
 
 
 
Reçu de traitement :
 
Je soubsigné Nicolas Preudhomme sieur de Lamarre avoir esté payé de don procureur de Begar de la somme de quinze pistolle pour avoir touché lorgue de labaye depuis le septiesme iour de Juillet 1651 jusque au septiesme d’octobre 1652 au pris de douze pistolle par an dont je le quitte entieremant jusque au dict iours faict a begar ce vingt neufiesme septembre 1652.
Nicolas Preudhomme.
(Archives départementales des Côtes d’Armor, H 103).
Reçu du traitement de Nicolas Prudhomme

 Reçu du traitement de Nicolas Prudhomme

 
COMMENTAIRES
 
Il s’agit ici de l’abbaye cistercienne de Bégar [1]. A ses origines, l’ordre cistercien refusait tout ornement superflu dans ses bâtiments et en particulier dans les églises. Le plain-chant sans accompagnement était la règle lors des offices. Depuis longtemps, cette règle primitive avait été oubliée. Au début du XVIIe siècle au plus tard, l’abbaye de Bégard était dotée d’un orgue. La première mention faite d’un instrument de ce type dans leur église remonte à l’année 1629 [2].
 
Le 3 mai de cette année le cellérier (le procureur) paya 22 sols « pour quatre peaux de cuir blanc pour accommoder les soufflets des petites orgues ». Cette formulation pourrait même laisser penser que l’église était également dotée de « grandes orgues ».
 
Le 10 avril 1632, il fut « baillé au facteur d’orgues de Lantreguier pour avoir accordé [les] orgues, 20 livres 8 sous ». Le 8 avril 1648 un marché est passé, pour la réparation des grandes orgues, entre Guillaume CHERBONNEL, sous-prieur, et Pierre TUAN, facteur d’orgue à Lamballe.
 
Le 6 novembre de l’année suivante, la restauration achevée, Pierre CADRO, organiste de la cathédrale de Tréguier et Martin PELART, organiste de Notre-Dame de Guingamp, certifiaient la bonne exécution du travail [3].
 
C’est donc sur cet instrument que jouait le sieur Prudhomme. Sa qualité de sieur ne doit pas excessivement surprendre. Cette qualification était prise, en particulier en Bretagne, par beaucoup qui ne prétendaient aucunement à la noblesse. Et si le sieur Prudhomme est issu d’une famille de petite noblesse, cela ne peut davantage surprendre, en particulier dans la mouvance ecclésiastique ou monastique, et notamment en Trégor où la petite noblesse était alors pléthorique. Beaucoup de cadets, en raison du partage noble en vigueur en Bretagne, se rapprochaient parfois de la plèbe [4]. Ils trouvaient dans certains emplois de service, de basoche, voire artistiques, et, pour un temps du moins, sans déroger, des possibilités de revenus.
 
La pistole utilisée ici doit être probablement comprise, non comme une pièce réelle (en or qui valait un peu plus de onze livres), mais comme monnaie de compte valant 10 livres tournois ; ce qui porte le salaire annuel (hors casuel) à 120 livres, soit la solde d’un caporal enrégimenté, ou le revenu d’une métairie moyenne.



[1] Forme originelle du nom. La leçon Bégard qui désigne aujourd’hui la commune s’étendant autour de cette ancienne abbaye est postérieure à la Révolution.
[2] Indirectement, mention est faite de l’existence d’un organiste six ans plus tôt. A la date du 29 juillet 1623, on lit dans le livre du procureur : « Payé à Rolland Allain pour avoir été à Pont-l’Abbé voir l’organiste, 48 sols ».
[3] LE GOFF Hervé, Bégard ou le petit Cîteaux de l’Armorique, Éditions Kelenn, 1980, p. 309-310.
[4] Jean MEYER parle dans ce cas de la « plèbe nobiliaire » ( La Noblesse bretonne, Flammarion, 1972, p. 35).

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